Quand une jeune femme vient voir Baba Yaga et lui demande comment trouver l’élu de son coeur, Baba Yaga ne la conseille pas sur la façon d’obtenir de belles fesses fermes, des lèvres sensuelles ou d’une façon de se déplacer captivante.
Elle l’envoie découvrir son agressivité, pleurer sa douleur et trouver son chemin, et chercher des perlesTurquoises.
Parce que les perles sont belles.
Quand une jeune femme vient voir Baba Yaga et qu’elle est désolée que toutes les autres autour d’elle sont belles, et qu’elle est la seule « moche », Baba Yaga ne lui donne pas de comprimés contre le vieillissement, le surpoids, le nez bossu ou la cellulite.
Elle marmonne : «Mademoiselle a mangé de la ciguë» et lui donne à sentir du romarin forestier.
Le romarin fait pleurer et pique le nez,
mais la vision de la jeune femme s’éclaircit et elle peut enfin percevoir sa beauté.
Quand une jeune femme épuisée vient voir Baba Yaga et se plaint de sa fatigue et de son manque de force, et de tout ce qu’il faut gérer, Baba Yaga ne lui donne pas un cours sur la gestion du temps pour qu’elle puisse en faire plus et ne remet pas en cause sa volonté.
Elle dénoue les tresses de la jeune femme et la conduit au sauna chaud, et après le sauna, l’enroule d’une couverture chaude, prépare un thé aromatique à la fraise des bois et lui demande où vont se perdre ses forces.
Et la jeune femme réalise tout le bien qu’elle essaie de donner aux gens, comment elle prend sur elle ce que les autres devraient porter, combien elle s’investit pour faire en sorte que tout le monde se sente mieux.
Et quel prix elle paie pour ça.
Quand une jeune femme vient voir Baba Yaga et dit qu’elle est perdue,Baba Yaga n’est pas pressée de lui donner une pelote magique qui lui montrera le bon chemin. Elle réchauffe la jeune femme dans le sauna et lui fait boire de la tisane au thym.
La grand-mère sait que le sauna nettoie le corps et que la conversation nettoie l’âme, alors elle dit à la jeune femme: « Raconte ton histoire ».
Et elle sait qu’au début, elle entendra des paroles virulentes, pleines de rancœur mais qui vont se transformer en regret, et c’est seulement tout au fond que les mots mots doux émergeront, car ils étaient cachés.
Et la jeune femme pleurera.
Les larmes feront tomber les œillères et les ténèbres de l’âme.
Et alors Baba Yaga peut enfin donner la pelote magique à la jeune femme.
Quand une jeune femme vient voir Baba Yaga et pleure, parce qu’elle a de la tristesse dans son cœur et qu’il n’y a aucun moyen de s’en débarrasser, la grand mère n’offre pas de beaux atours et de joyeuses chansons.
Elle allume un feu, prépare de l’infusion aux myrtilles et, au son des brindilles crépitantes dans le feu, demande à la jeune femme de lui parler de ce qui est mort depuis longtemps, mais n’est pas enterré et pleuré.
Il est temps de laisser les chose partir, même si on en a plus la force.
Elle lui raconte le moment sombre où l’arbre perd sa dernière feuille, ne sachant rien du printemps.
Elle lui parle du temps où la vie extérieure meurt.
Du froid et du vide à l’intérieur.
De la peur que ce soit toujours comme ça. De l’espoir que le printemps va arriver et que de nouvelles feuilles vont pousser là où les anciennes sont tombées.
Et elle parle de perles Turquoises.
Parce que les perles sont belles.